Suite au Mercredi 19 NOVEMBRE 2014 à 14h00 au COUR D’APPEL de RENNES Mme LE GALL CTS Procédure contre le CEA pour la reconnaissance de la maladie professionnelle
Maître Cécile Labrunie, nous a transmis l’arrêt que vient de rendre la Cour d’appel de Rennes dans l’affaire opposant Monsieur Pierre LE GALL à son ancien employeur, le CEA, au terme d’une procédure particulièrement longue et difficile, dont M. LE GALL n’aura malheureusement pas connu l’issue puisqu’il est décédé en 2012. Au terme de huit années de procédure, la Cour d’Appel a jugé que le cancer du poumon dont était atteint Monsieur LE GALL est la conséquence de la faute inexcusable de l’employeur et a fixé le montant de l’indemnisation au titre de la réparation des préjudices qu’il a subi. Rappelons que Monsieur Pierre LE GALL a été employé par le Commissariat à l’Energie Atomique (CEA) du 30 Mai 1957 au 1er Juillet 1994. (PSV n°1 et 2) Il a d’abord travaillé pour le CEA-MINES de 1957 à 1962, puis à partir du 7 Septembre 1962 il a intégré le CEA-DAM. Pendant toute sa carrière il a été directement affecté à des travaux sous rayonnements ionisants. Il a notamment effectué de très nombreuses missions dans le SAHARA au Centre d’Expérimentations Militaires des Oasis (CEMO) entre 1961 et 1966, et en POLYNESIE FRANCAISE au Centre d’Expérimentation du Pacifique (CEP) à MORUROA et à FAUGATAUFA ainsi que sur le site de HAO entre 1966 et 1991, en zone contrôlée ou surveillée.
Monsieur LE GALL a été victime d’un cancer broncho-pulmonaire primitif, diagnostiqué et opéré en 1992. Par décision du 19 Février 2007, la Caisse Primaire d’Assurance Maladie a informé Monsieur LE GALL de la prise en charge de sa maladie au titre de la législation sur les risques professionnels (tableau n°6 des maladies professionnelles).
Parmi les motifs retenus par la Cour, nous retiendrons les suivants :
– Parmi les affections provoquées par les rayonnements ionisants, le tableau n°6 des maladies professionnelles (en annexe du Code de la Sécurité Sociale) vise le cancer primitif broncho-pulmonaire par inhalation, en fixant, pour cette affection, un délai de prise en charge de 30 ans. Le tableau n°6 n’édicte aucune condition à une dose minimale quant aux particules radioactives inhalées.
– Par ailleurs, c’est par des motifs pertinents, reposant sur une analyse exhaustive des productions, et que la cour adopte, que les premiers juges, ont admis que les consorts Le Gall rapportent la preuve de l’exposition habituelle de leur auteur au risque d’inhalation de particules radioactives, donc au risque d’irradiation interne.
– Faute par le CEA de démontrer que le travail habituel de Monsieur Le Gall n’a joué aucun rôle dans la surveillance de l’affection, les premiers juges ont admis à juste titre que la maladie en cause avait un caractère professionnel.
– Le CEA ne conteste évidemment nullement la conscience qu’il avait du danger auquel il exposait Monsieur Le Gall en le faisant travailler sous rayonnements ionisants.
– Le décret n° 86-1103 du 2 octobre 1986, relatif à la protection des travailleurs contre les dangers des rayonnements ionisants, obligeait l’employeur à remettre à tout travailleur affecté dans la zone contrôlée ou appelé à y pénétrer occasionnellement, ce qui était le cas de Monsieur Le Gall, une notice écrite informant le salarié :
–> des dangers présentés par l’exposition aux rayonnements ionisants et de ceux présentés par son poste de travail ;
–> des moyens mis en œuvre pour s’en prémunir ;
–> des méthodes de travail offrant les meilleures garanties de sécurité ;
–> des garanties que comportent pour lui les mesures physiques et les examens médicaux périodiques.
– Le CEA, qui n’apporte par ailleurs aucune précision sur la formation qu’il a pu faire dispenser à Monsieur Le Gall pour le préparer à l’exercice des fonctions, par nature dangereuse, qui étaient les siennes, ne justifie ni de la remise d’une telle notice règlementaire, récapitulant les risques auxquels il était exposé et les moyens de s’en protéger, ni, de façon plus générale, de la délivrance d’une information tenant compte de la spécificité de ses fonctions au sein de l’entreprise.
– Même si les premiers juges ont procédé à une exacte analyse des faits de la cause en retenant qu’il n’est pas avéré que les moyens de protection mis à la disposition de Monsieur Le Gall étaient insuffisants, il doit être déduit de ce qui précède que le défaut d’information de l’intéressé, dont il n’est pas certain qu’il ait été mis en situation, à compter de son affectation sur les zones d’essais nucléaires, de prendre d’emblée la mesure des risques liés à l’exercice de son activité professionnelle, caractérise un manquement du CEA à ses obligations, l’employeur n’ayant pas pris toutes les mesures pour préserver Monsieur Le Gall des dangers auxquels il était exposé dans le cadre de l’exercice de ses fonctions.
Les conclusions ont été les suivantes :
Malheureusement, Pierre Le Gall nous a quittés le 25 juillet 2012 sans connaître cette décision de justice favorable.
Nous avons la chance de pouvoir engager une procédure auprès du Cabinet Teissonnière sans frais d’honoraires jusqu’en cassation, seulement être à jour de ses cotisations.
C’est pourquoi il ne faut pas se décourager et ne pas hésiter à aller jusqu’en cassation. Au regard des sommes perçues par la famille de Pierre Le Gall, il faut parfois savoir perdre 1.200€ de frais de cassation qui seront largement compenser par les indemnisations qui pourront être versées.