Des plaignants déboutés à Pau
La Dépêche du Midi le 30 mars 2013
Essais nucléaires : des plaignants déboutés à Pau La Dépêche du Midi – Publié le 30/03/2013 à 08:12
Tarn

Plusieurs plaignants, exposés à des radiations lors des essais nucléaires dans le Sahara dans les années soixante, ont été déboutés par le tribunal de Pau. Ils avaient saisi la justice pour réclamer des indemnisations.
Ils sont cinq. Cinq anciens militaires ou veuves de militaires. Tous estiment avoir été exposés à des radiations lors des essais nucléaires réalisés par l’armée française dans le désert du Sahara et en Polynésie. Parmi eux, Claudine Subra, qui vit dans le Gers. Son mari est mort, à l’âge de 43 ans, d’un cancer des poumons. «Il avait participé aux essais nucléaires en Polynésie où il avait séjourné pendant deux ans. Entre mai 1968, date de son arrivée là-bas, et l’année 1969, il y avait eu cinq tirs nucléaires» indique Claudine Sutra, joint hier par téléphone. Cette femme, diminuée par la maladie, juge «scandaleuse» la décision du tribunal administratif de Pau. «Il aurait fallu que je prouve qu’il avait été irradié. Mais comment ?» dit-elle, indiquant qu’elle allait faire appel de cette décision.
Gérard Dellac, qui vit dans le Tarn, à Montcabrier, a lui aussi été «irradié» lors du premier essai nucléaire français, le 13 février, au cœur du désert du Sahara (lire ci-contre). Lui aussi se bat, depuis des années, pour obtenir une indemnité. «Nous sommes toujours en attente d’une expertise auprès du tribunal de Toulouse» explique son épouse. Même si son mari n’est pas directement concerné, la décision du tribunal de Pau a quelque peu douché leurs espoirs. «On nous prend pour des imbéciles. Il faut continuer à se battre. On rédige une pétition pour changer la loi» précise Gérard Dellac.
En janvier 2010, une loi avait été votée relative à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires réalisés par la France au Sahara et en Polynésie française entre 1960 et 1996. Le texte déterminait la carte des régions et la liste des maladies dites «radio induites» – 18 cancers – ouvrant droit à réparation, en acceptant le «principe de causalité».
«Sauf que l’indemnisation est accordée à moins que le risque attribuable aux essais nucléaires puisse être considéré comme négligeable. Comment le prouver en l’absence de documents, sachant que les cancers mettent parfois très longtemps à se développer ? Sur les 900 dossiers présentés au comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires (CIVEN), seuls une dizaine a fait l’objet d’une indemnisation» précise son épouse.
Quand Gérard Dellac est rentré du Sahara, il a commencé à perdre ses cheveux par plaques entières avant de développer, quelques années après, un cancer de la peau. À 75 ans, après de nombreuses opérations, il attend toujours d’être indemnisé.
Dans le cratère de la bombe
Gérard Dellac, était à Reggane, le 13 février 1960, quand la première bombe nucléaire française a explosé. L’an dernier, il nous avait raconté sont histoire.
«On était à environ 40 km du lieu de l’explosion. Soudain on a entendu une énorme déflagration. On a vu un flash immense et un nuage qui s’élevait dans le ciel. Je me rappelle qu’il n’y avait qu’une paire de lunettes pour 40 bonhommes. Après l’explosion, nous sommes partis en camion pour relever les mesures de contrôle. On devait être à 5 ou 6 kilomètres du cratère. Ensuite, on est passé dans un sas de décontamination. On a aussi pris des douches».